"Lettre à moi même."
Rappelle-toi.
Ce rêve...
Tu y es déjà allée.
Il y a longtemps.
Tu avais oublié.
C'était une ruelle discrète, baignée de lumière tiède.
La façade en bois brut.
Le nom de la boutique, presque effacé, mangé par le temps.
Un petit olivier, planté dans un pot d’argile, veillait là, comme une sentinelle.
Il ne disait rien, mais il savait que tu reviendrais.
Tu pousses la porte. La cloche t’interpelle, légère.
Tu entres. Et tu te souviens.
Ce n’était pas une boutique ordinaire. C’était un lieu-mémoire.
Un espace entre deux mondes. Entre ce que tu montres et ce que tu es.
Autour de toi : une table, une chaise, un livre entrouvert, des bijoux dans une boîte.
Tu fouilles sans vraiment chercher. Ou peut-être que si.
Tu ne cherches pas un objet, tu cherches un lien.
Un signe. Un anneau.
Et puis, tu vois ces lettres.
Gold.
ArgƎnt.
Ce « e » à l’envers — un toit, un coeur, un 3 renversé.
Ce n’est pas un bijou. C’est une clé.
La tienne.
Ici, rien n’est en vitrine pour tout le monde.
Chaque client est un rendez-vous. Un souvenir.
Ce que tu tiens entre tes doigts n’est pas un accessoire, c’est un écho.
Une mémoire d’âme, qui a traversé les saisons, les silences, les doutes.
Ce bijou, peut-être banal pour d’autres, te reconnaît.
C’est toi qui lui donnes sa noblesse.
C’est toi, le souffle qu’on avait oublié.
Toi, que l’on avait appris à faire taire.
Toi, que l’on avait laissé de côté.
Mais aujourd’hui, tu es entrée.
Et cette boutique a reconnu ta lumière.
Alors, rappelle-toi.
Tu es la clé.
Et moi… je t’attendais.
Souviens-toi de moi.